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Un plan national d’actions loup décevant

Un plan national d’actions loup décevant
Le gouvernement a récemment dévoilé son nouveau Plan National d’Actions 2024-2029 sur le loup et les activités d’élevage (PNA), accompagné de deux arrêtés : l’un fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus), et l’autre relatif à l’indemnisation des dommages causés aux troupeaux domestiques par le loup, l’ours et le lynx.

 

Des protocoles de tirs simplifiés facilitant encore plus l’abattage des loups 

Le premier arrêté mentionné plus haut, qui fixe les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées, est en lien avec tout un volet du PNA réservé aux prélèvements du loup, où de nombreux assouplissements sont prévus.

Il est de plus en plus évident que les conditions préalables aux tirs sont considérablement réduites. Autrefois, ces tirs étaient soumis à des conditions de prédation qui, de nos jours, ont pratiquement disparu. Il fut un temps où la phase d’effarouchement était un prérequis indispensable, pourtant, elle a totalement cessé.

Dans l’article 6. III de l’arrêté, il est question de “mise en œuvre” des mesures de protection qui implique l’installation effective et proportionnée de moyens de prévention de la prédation par le loup, sous supervision des autorités compétentes. Néanmoins, l’expérience acquise au cours des 14 dernières années avec le programme d’Animal Cross met en lumière le non-respect fréquent des conditions de protection stipulées dans les arrêtés de tir. De plus, il est à noter que la Direction Départementale des Territoires (DDT), pour éviter tout conflit avec les éleveurs, néglige systématiquement de signaler les failles dans ces mesures de protection, autorisant ainsi les tirs. Quelle que soit la réalité de ces mesures.

Un lieutenant de louveterie en train d’appâter un loup 

L’article 11, paragraphe III mentionne que, sous réserve de l’approbation de l’OFB, tous les moyens pour améliorer la défense contre les loups peuvent être utilisés, mais ils ne doivent pas provoquer intentionnellement des réactions chez les loups pour les rendre détectables ou les attirer vers les tireurs. Or, nous avons constaté que l’appâtage pour attirer les loups afin de les tirer existe, bien que cela semble être marginal.

L’article 15 révèle une dérive inquiétante dans l’application du tir de défense simple. Le nombre de tireurs autorisés par lot est excessif, pouvant aller jusqu’à 2 à 3 tireurs ; ce qui signifie qu’un nombre considérable de tireurs peuvent être mobilisés dans un même territoire pour éliminer un loup, même avec une seule autorisation de tir de défense simple.

Quant à l’article 16, il met en lumière les failles du recours au tir de défense renforcée. Ce dispositif est trop simplement et rapidement décrété, sans qu’il n’ait de contrôle adéquat des conditions de protection. Aucune chance n’est laissée au loup.

Le chapitre III concerne les tirs de prélèvement qui peuvent être autorisés dans certains territoires où, entre autres, le préfet coordonnateur du plan sur le loup émet un avis sur ces autorisations en se basant sur le suivi de la prédation et d’autres facteurs. C’est une véritable chasse au loup qui peut être ouverte alors que le recours aux tirs de prélèvement était assez rare ces dernières années. Le préfet a donc l’entière liberté de déclencher cette chasse.

Dans le chapitre IV, le préfet coordonnateur du plan sur le loup délimite des zones où les troupeaux rencontrent des difficultés importantes face à la prédation des loups, en tenant compte de divers facteurs comme les caractéristiques du milieu, les pratiques d’élevage et les attaques passées. Dans ces zones, les tirs de défense et de prélèvement peuvent être autorisés sous certaines conditions, notamment lorsque les troupeaux subissent des attaques répétées malgré les mesures de protection mises en place. Malgré la nécessité d’avoir un processus de préparation qui devrait prendre de 2 à 3 ans, il est observé que l’élimination des loups gêneurs est souvent privilégiée sans que ce travail préparatoire ne soit effectué. Le flou entourant ce texte réglementaire permet des interprétations laxistes, ouvrant ainsi la porte à des pratiques discutables.

Des indemnisations dans le but de calmer les éleveurs

Le second arrêté publié fixe les montants d’indemnisation pour les pertes causées par les attaques de loups, d’ours et de lynx sur les troupeaux domestiques. Il détaille également les conditions d’indemnisation des animaux tués ou disparus, ainsi que des frais vétérinaires. Ces indemnisations ont été améliorées, bien entendu, afin d’éviter la violence des syndicats d’élevage. 

La comparaison des niveaux d’indemnisation entre la France et d’autres pays, notamment l’Allemagne et la Castille-et-León, montre une disparité significative, comme l’indique le rapport du IGEDD (CGDD) intitulé « Parangonnage sur la politique publique du loup » :

  • écart des dommages : le rapport met en évidence que la France enregistre trois fois plus de dommages causés par les loups que l’Allemagne, malgré une population lupine inférieure. Cette différence soulève des interrogations sur la gestion des troupeaux et la protection des élevages.
  • dépenses d’indemnisation : les dépenses d’indemnisation par loup en France sont considérablement plus élevées que dans d’autres pays. En effet, avec 38 800 euros rapportés au nombre de loups, la France dépense quatre fois plus qu’en Allemagne et huit fois plus qu’en Castille-et-León. Cette différence souligne une possible propension à la fraude ou à une grande tolérance dans la gestion des indemnisations.

Ces constats soulèvent des questions importantes quant à l’efficacité et à l’équité du système d’indemnisation en France, ainsi que sur la nécessité d’une réforme pour garantir une meilleure gestion des dommages causés par la prédation des loups.

Selon Marc Fesneau, « ce PNA est donc celui d’un rééquilibrage pour concilier conservation de l’espèce et sauvegarde des activités d’élevage. »¹. Alors que la réalité est tout autre : ce prétendu « rééquilibrage » ne garantit en rien la protection adéquate du loup, bien au contraire. La décision de considérer le loup comme une espèce ayant atteint un seuil de « viabilité » sous-estime largement les défis persistants auxquels le loup est confronté. De plus, l’éventualité d’un déclassement du loup, passant d’espèce « strictement protégée » à « protégée » par l’Union Européenne ouvrirait tout simplement la voie à une gestion cynégétique plus permissive. Pour Animal Cross, ce PNA favorise les intérêts des lobbys agricoles au détriment de la conservation du loup.

 

¹ : https://agriculture.gouv.fr/plan-loup-un-nouveau-cadre-national-dactions-pour-renforcer-la-coexistence-du-loup-et-des-activites

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