Et si on vous disait qu’en Haute-Savoie, les fonds publics départementaux destinés à effectuer un suivi biologique des loups ont été détournés dans le but de tuer cette espèce sauvage : étonnant ?
UN COMPTAGE DES LOUPS POUR MIEUX LES TUER
Voici longtemps que concernant les loups, les chasseurs rêvent (tout comme pour les comptages d’espèces animales « gibiers ») d’être à la fois juge et partie en estimant les populations, puis en définissant eux-mêmes les quotas d’animaux à tirer.
Ils ont, aux côtés de la FDSEA et d’autres syndicats agricoles, multiplié dans la presse les mises en cause des estimations de population de loups, les doutes sur la méthodologie de « comptage » de l’OFB (Office Français de la Biodiversité), comme c’est le cas dans cet article et dans des dizaines d’autres. En comité loup de Haute-Savoie (CDL74), il y a même eu des interpellations directes de l’OFB, en présence du préfet, mais aussi du préfet « référent loup », des députés présents et des responsables d’origines diverses invités. Ils approchent du but.
ACHAT DE LUNETTES THERMIQUES AUX FRAIS DU DÉPARTEMENT POUR COMPTER LES LOUPS
Nous avions bien remarqué, lors de la présentation des chasseurs de la FDC en CDL74 (dans lequel Animal Cross représente depuis 10 ans FNE et les défenseurs de la vie sauvage), que leur choix de lunette thermique (financées par le conseil départemental dans un but de comptage) s’était porté sur un modèle LEICA qui avait la rare particularité de ne pas seulement offrir de bonnes capacités optiques la nuit, mais d’être très aisément monté sur une arme, et tout aussi rapidement démonté si d’aventure on avait la malchance de recevoir la visite d’un agent de l’OFB, en se trouvant en situation illégale de tireur de loup la nuit. Il eût été ballot d’être alors en situation d’illégalité en regard d’une constante des arrêtés préfectoraux de tir de défense du loup , celle n’autorisant pas les chasseurs « à utiliser des lunettes de tir à visée thermique » (1).
DES LUNETTES QUI SERVIRONT FINALEMENT À MIEUX DETRUIRE LE LOUP
Personne, y compris même, sans doute, le conseil départemental (2), n’a jamais cru que les chasseurs, associés aux lieutenants de louveterie et aux éleveurs puissent s’investir dans le suivi biologique du loup sans l’arrière-pensée de se servir de la connaissance ainsi acquise pour pouvoir mieux les détruire. C’est d’ailleurs ce qui a été bien décrit dans cette belle synthèse de Reporterre.
Eh bien, et nous arrivons là au cœur de notre sujet, la réalité a enfin été dévoilée dans cette vidéo, au cours de laquelle le président de la FDC Haute-Savoie se félicite des moyens et du dispositif de suivi mis en place, à force de pression sur la préfecture et sur les différents acteurs de l’Etat : il s’embrouille un peu, et confie que les lunettes thermiques, initialement prévues pour faire du “suivi loup”, serviront en réalité à améliorer l’efficacité des tirs auxquels ils participent (de nouveau) activement. « De nouveau » car ils s’étaient retirés théâtralement (en CDL74) du dispositif de tir lorsque les lieutenants de louveterie, mieux équipés que les chasseurs, étaient les seuls à ne pas rentrer bredouilles.
Leur corporation opère à un tel niveau d’impunité, vu leurs soutiens gouvernementaux au plus haut niveau, qu’ils n’ont pas jugé utile de retirer cette bourde de l’espace médiatique, et que ce détournement de fonds publics au profit du plaisir de tuer, peut rester accessible à tous.
(1) Notez la différence notable du point de vue opératif, entre les « dispositifs de repérage « (non liés à l’arme), et les lunettes de tir (fixées sur l’arme).
(2) CD qui a quand-même financé 200 pièges photographiques, 20 lunettes thermiques de visée nocturne, des enregistreurs et même des véhicules.