Pêche industrielle : bientôt des mers sans poissons ?

 

Le rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnement ( PNUE) présenté le 17 mai 2010 montre clairement que le code de la FAO n’a pas été respecté : « Les stocks de poissons sont actuellement pillés ou exploités à un rythme insoutenable à travers le monde. Il s’agit d’un échec majeur de la gestion de nos ressources, cet échec prendra des proportions monumentales s’il n’est pas pris en compte rapidement. » prévient Achim STEINER, secrétaire adjoint de l’ONU et directeur exécutif du PNUE. (www.unep.org)

Les océans qui représentent 71% de la surface terrestre et qui abritent tant d’espèces marines sont aujourd’hui menacés par la surpêche. C’est une véritable industrie de la pêche qui s’est développée pour répondre à une demande accrue de produits de la mer. La consommation mondiale de produits aquatiques a doublé ces 30 dernières années, passant de 6 à 16 kg/personne/an. En 2006, la production mondiale s’élevait 144 millions de tonnes de poissons, mollusques et crustacés, dont 92 millions de tonnes pour la pêche et 52 pour l’aquaculture.Et la consommation mondiale devrait encore doubler d’ici à 2030…

Des stocks de poissons pillés à un rythme insoutenable

Les conséquences sont évidemment lourdes tant pour les écosystèmes que pour les espèces marines. Déjà en 1995, la FAO ( www.fao.org) édictait un « code de conduite pour une pêche responsable » indiquant que « Le droit de pêcher implique l’obligation de le faire d’une manière responsable, afin d’assurer la conservation et la gestion rationnelle des ressources bio-aquatiques ».

Le rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnement ( PNUE) présenté le 17 mai 2010 montre clairement que le code de la FAO n’a pas été respecté : « Les stocks de poissons sont actuellement pillés ou exploités à un rythme insoutenable à travers le monde. Il s’agit d’un échec majeur de la gestion de nos ressources, cet échec prendra des proportions monumentales s’il n’est pas pris en compte rapidement. » prévient Achim STEINER, secrétaire adjoint de l’ONU et directeur exécutif du PNUE. ( www.unep.org)

Pêche industrielle : une pêche dévastatrice

Une capture multipliée par 4 en 50 ans : 30 % des réserves de poisson ont déjà disparu

La surpêche est effective lorsque les prélèvements effectués par la pêche sont supérieurs aux capacités de ces espèces à se renouveler. En 50 ans la capture des poissons a été multipliée par 4, et selon la FAO, 50% des stocks mondiaux sont aujourd’hui exploités au maximum de leurs capacités ; 28% sont surexploités (voir sur le site www.fao.org : « la situation mondiale des pêches et de l’aquaculture », document publié tous les 2 ans pour donner une vue d’ensemble objective et globale des pêches de capture et de l’aquaculture).Le rapport du PNUE indique que 30% des réserves halieutiques ont déjà disparu…

Cette industrie de la pêche s’est développée très rapidement pour répondre à une consommation accrue, ce qui a entraîné un véritable pillage des océans sans se préoccuper de son équilibre écologique. C’est dans ce but de rentabilité que des techniques nouvelles ont été mises au point :

Mise en place d’une flotte industrielle aux dimensions démesurées

1% de la flotte mondiale assure à elle seule 50% de la capacité de la pêche mondialeavec des chalutiers immenses ( dont certains ont la capacité de 7 boeings 747 ! ) et desbateaux-usines à proximité pour accélérer la commercialisation des produits de la mer.

Des innovations technologiques qui ne laissent aucune chance aux poissons

GPS et sonars permettant de traquer les bancs de poissons sans erreur ; filets dérivants de plusieurs kilomètres de long, véritables murailles de nylon ; lignes munies de milliers d’hameçons ; chaluts de fond de plus en plus larges et profonds….

10 milliards de dollars par an pour la pêche-pirate

La demande accrue de produits de la mer a très vite généré une course au profit : 10 milliards de dollars / an pour ce qu’on appelle la pêche-pirate. Elle se pratique soit sous pavillon de complaisance (que l’on peut acheter sur le net !) soit au sein d’une flotte officielle, en général le long des côtes africaines qui sont les moins surveillées. Dans tous les cas il s’agit de navires non-autorisés qui n’hésitent pas à prélever des espèces hors des zones attribuées par les concessions de pêche, parfois même jusque dans les zones de reproduction. Ces prélèvements sont rapidement traités dans les navires-usines à proximité. La traçabilité de la pêche devient vite impossible …..et les étals de nos commerces regorgent de poissons braconnés.

La situation en France est à ce propos révélatrice : c’est un des grands pays pêcheurs de l’Union Européenne – depuis les années 90, les pêcheries débarquent environ 600 000 tonnes/an de produits de la mer – mais la production nationale ne couvre qu’un tiers environ de la demande, d’où de fortes importations. En effet les Français sont, en Europe, parmi les plus grands consommateurs de produits de la mer : en moyenne 36 kg/habitant/an .

voir le site : www.Ifremer.fr/pêche.

Des conséquences désastreuses

Les écosystèmes marins sont de plus en plus vulnérables

Ainsi les fonds marins – algues et coraux- sont-ils endommagés par les chaluts de fond.

La population marine diminue de plus en plus rapidement

En 25 ans, dans la zone Asie-Pacifique, on est passé de 6% à 33% d’espèces en moins.

D’après le centre écologique et culturel de Kiev, la population de l’esturgeon a diminué de 99%.

En Méditerranée c’est le thon rouge qui est menacé de disparition d’ici à 2012 : en 2005 les quotas de pêche pour cette espèce ont été dépassés de plus de 40 % pour satisfaire les besoins des marchés européen et japonais : 30.000 tonnes exportées vers le Japon en 2007.

La commission européenne a adopté une loi visant à suspendre la pêche au thon rouge dans l’Atlantique- Est et en Méditerranée.

Voir le site :wwf. wwf.fr /océans et côtes

Par voie de conséquence cette raréfaction des poissons entraîne celle d’autres espèces marines qui ne peuvent plus suffisamment se nourrir (oiseaux et mammifères ) .

Les dégâts collatéraux causés par la surpêche sont énormes

Les filets dérivants ont des maillages si fins qu’il faut ensuite rejeter tortues, dauphins, poissons peu rentables ou trop jeunes – et ceci qu’ils soient morts ou blessés – .On estime qu’en moyenne ce sont 10 millions de tonnes de poissons qui sont rejetés chaque année !

Des solutions avant qu’il ne soit trop tard ?

Ce que préconise le PNUE :

Renforcer les quotas de pêche pour des prises moins importantes.
Favoriser des flottes plus petites que celles de la pêche industrielle.
Développer des zones marines protégées, afin que les espèces puissent se reproduire et atteindre leur taille adulte.
Pour tendre vers une gestion durable de la pêche mondiale, le PNUE prévoit un investissement moyen de 8 milliards de dollars par an et estime que cet investissement pourra être couvert par une redistribution des subventions allouées au secteur de la pêche.

« Les solutions sont sous la main, mais la volonté politique et une économie ordonnée sont nécessaires. » conclut M. SUKHDEV, directeur du PNUE.

Une urgence qui tarde ! A quand des mesures concernant des méthodes visant à diminuer les souffrances des poissons ?

En effet il est crucial de se demander quelles douleurs ressentent ces poissons lorsqu’ils sont traqués, entassés, étouffés, écrasés, vidés vivants, victimes d’asphyxie sur le pont des navires ou rejetés mutilés, blessés …

A titre d’exemple : piégé dans un filet, le poisson manifeste une douleur – peut-être muette à nos oreilles mais bien réelle- par une augmentation de son rythme cardiaque et de sa fréquence respiratoire . La remontée du filet entraîne une baisse de pression trop brutale provoquant une explosion de la vessie, une expulsion des yeux hors des orbites et une remontée d’organes dans la bouche.

Voir article « Aquaculture » : et si on parlait de la souffrance des poissons ?

Quelques solutions pour une consommation responsable

  • Modérons notre consommation de produits de la mer, en variant les espèces et en évitant la période de reproduction .
  • Concernant notre santé , voir les recommandations de l’agence française de sécurité sanitaire des aliments : site www.Afssa.fr
  • Renseignons-nous sur les espèces les plus menacées ou surexploitées. Exemple : le thon rouge, le cabillaud, les poissons des grands fonds comme le sabre, l’empereur, le grenadier…Consulter les listes disponibles sur le site www.wwf.org ou www.pourunepechedurable.fr
  • Renseignons-nous également sur le mode de pêche (si possible pas de poisson issu de la pêche au chalut) et évitons le poisson d’élevage , surtout pour les espèces carnivores ( saumon, bar, daurade).
  • Préférons les poissons pêchés localement.
  • Privilégions les labels Bio ou MSC.

Le label Bio AB garantit en France un poisson d’élevage respectant un cahier des charges ( organisme certificateur : www.qualite-France.com) : une densité moindre dans les bassins et des eaux de 1ère qualité ( classe A), une nourriture saine sans aucun produit d’animaux terrestres, composée de farines de poissons issues de pêches gérées par quotas, de végétaux issus de l’agriculture bio et sans OGM, de vitamines et de minéraux, une absence d’antibiotiques et de colorants.

Le label MSC : le « Marine Stewarship Council » est une organisation internationale indépendante qui vise à favoriser une pêche durable avec un programme d’éco-étiquetage « MSC » seul label garantissant les conditions d’une pêche évitant la surexploitation des espèces et la dégradation des écosystèmes marins.En choisissant les produits labellisés MSC, nous encourageons la gestion responsable de nos ressources issues de la pêche et nous contribuons à une meilleure santé de nos océans. 57 produits de la mer labellisés MSC sont actuellement disponibles en France, y compris dans la grande distribution.Voir le site : www.msc.org

  • Vérifier l’étiquetage qui doit indiquer la dénomination de l’espèce, le mode de production ( type de pêche ou élevage) et la zone de capture ou le pays d’élevage.

 

En 2009 , le conseil national de la consommation s’est dit favorable à un étiquetage spécifique pour les poissons nourris sans OGM.

Mais cet étiquetage ne concerne que les produits bruts non transformés. C’est ainsi que le problème de l’étiquetage demeure car nombre de produits de la mer sont rapidement transformés, cuits, panés, intégrés dans des mélanges ( ex : crevettes et fruits de mer) et il n’est plus possible d’en vérifier le mode de production et d’alimentation, la provenance.

La commission européenne souhaite quant à elle , l’élaboration d’un étiquetage relatif aux conditions de vie des animaux ( avec plus de contrôles des conditions d’élevage et de transport) pour permettre à un label européen de voir le jour….

Voir aussi notre article sur l’aquaculture